Arrivés depuis quinzaine de jours, nous commençons à prendre nos repères à Las Palmas (île de Gran Canaria).
Les dix-sept jours de mer se sont plutôt bien déroulés, malgré l'intoxication alimentaire de Claire, dès le deuxième jour (je note : Acheter le poisson au marché aux poissons, et non par terre dans la rue). C'était pas la grande forme pendant deux ou trois jours, les quarts étaient un peu difficiles à tenir.
Heureusement, jusqu'aux Canaries la météo était clémente, pour une fois on n'aurait même pas été contre un peu plus de vent (vous allez dire qu'on n'est jamais contents !). On s'est même payé le luxe d'un apéro toutes voiles affalées, faut bien se consoler. Les quatre derniers jours nous ont rappelés notre condition de misérable petits vermisseaux face à la nature : sous le vent des îles, succession de calmes et d'accélérations soudaines du vent.
On commence à capter la FM, on en profite pour se mettre à l'espagnol... Il y a du boulot !
On a quand même fini par jeter l'ancre dans le port de Las Palmas. Au premier débarquement, notre annexe est volée. Je peux vous dire qu'on se sent un peu bêtes, sur le rivage, à regarder le bateau devenu d'un seul coup beaucoup moins accessible. Mais la solidarité entre voileux existe, et nous sommes ramenés sur Zigzago par des voisins.
Direction le ponton, avec un accostage un peu trop musclé à la clef ; bah, on doit refaire la peinture de toutes façons... Eau courante, plus de roulis, il suffit d'enjamber le balcon pour être à terre... On y prend goût.
Depuis, les travaux ont recommencé : nettoyage de la coque, pour arrêter l'électrolyse (réaction chimique qui ronge l'aluminium) qui s'était installée un peu partout. On démonte les vaigrages, enlève toute l'isolation : on trouve du sable, des petits bouts d'isolant, des boulons rouillés, un peu de tout, quoi. Le tout retient bien l'humidité, vu l'eau qu'on a encore embarquée pendant la navigation. On rince tout au jet d'eau, adieu le sel.
C'est quand même un gros boulot, ça ne nous laisse pas le temps de jouer les touristes... Et on vit dans un capharnaüm indescriptible ! Mais c'était nécessaire ; et puis j'en profite pour tout peindre en jaune... Mais c'est que ça commence à prendre tournure !
On enchaîne illico sur la construcion d'une annexe pliable, en bois. Le ponton commence à ressembler à un véritable chantier !
On apprend beaucoup, notamment que la colle, formidable au demeurant, laisse des taches noires très récalcitrantes pendant des jours. Plus sérieusement, Robert, voisin de ponton menuisier à la retraite, nous explique pleins de trucs, nous prête ses outils... Bref, on est bien entourés !
Vous aurez deviné qu'on ne connaît pas tellement l'île après tout ça ! Par contre, on a marché et remarché dans Las Palmas, visité jusqu'à la zone technique pour trouver des fournitures.
On ne peut pas dire que ce soit vraiment une belle ville : un front de mer à l'espagnole (gros immeubles et autoroute), un autre pour les touristes (restos et boîtes de nuit derrière la plage), constructions de béton, voitures omniprésentes...
Il y a quand même le vieux centre avec sa cathédrale (ah, la cathédrale) et ses rues colorées, et les quartiers haut (on dirait que les architectes en ont construits les habitations comme les enfants jouent aux cubes), populaires et très vivants.
Nous sommes encore un peu décalés. On se réhabitue au rythme européen, mais impossible de s'énerver contre un feu qui ne passe pas au vert quand on a attendu dans la bonne humeur une pirogue pendant plus d'une heure.
C'est l'Espagne, tapas, sieste, et la civilisation selon Willy : charcuterie et fromage. Les week-end retrouvent leur sens : la plage est bondée, les pêcheurs envahissent les digues du port, les bateaux sortent pour la journée, ou viennent juste s'amarrer au bout d'un ponton et sortent les parasols dans le cockpit. Le port devient une aire de jeux pendant deux jours.
La caisse de bord se vide à un rythme européen aussi, l'euro est horriblement cher... Finies les vacances, il va falloir travailler, non seulement sur le bateau, mais aussi pour gagner quelques sous. Mouais, le programme à venir est nettement moins enthousiasmant qu'auparavant !
Il faudra quand même qu'on fasse un détour par la France prochainement, histoire de régler quelques affaires, et surtout de revoir quelques bipèdes de notre connaissance.